à un ami d'enfance
dis-moi te souviens-tu

te souviens-tu d'agnès
la fille du collabo
qu'avait la taille épaisse
et d'imposants lolos

c'était pas un canon
mais on la cultivait
elle disait jamais non
quand on la culbutait

dis-moi te souviens-tu

de l'église saint-remi
aussi noire que le deuil
des enfants de marie
alignées sur son seuil

du bistrot près du square
du billard à bouchons
du curaillon vicelard
qui r'luquait les garçons

dis-moi te souviens-tu

de gérard de vincent
nos complices en rapines
de nos vains expédients
de nos piètres combines

du soleil de juillet
et de nos randonnées
quand l'été existait
sans rappeler janvier

dis-moi te souviens-tu

de la rue de la lys
le long du chemin d'fer
des ombres qui se glissent
des prémices de l'enfer

quand on baisait debout
contre la palissade
le froc sur les genoux
et le coeur en chamade

dis-moi te souviens-tu

te souviens-tu d'yvette
la femme de l'épicier
cette experte en braguettes
rouquine aux doigts de fée

qui nous faisait crédit
en plus de ses câlins
payement tous les samedis
ou à la saint-glinglin

dis-moi te souviens-tu



sans doute que j'en oublie
des souvenirs d'alors
mais dis-moi je t'en prie
si tu y penses encore

dis-moi te souviens-tu